TOUR DU MONDE DE L’HABITAT VU PAR LA SOCIÉTÉ CIVILE

Ville Globale

Dernière mise à jour le 12 septembre 2019

Un modèle nouveau d’habitat dans une société mondialisée

Dans son ouvrage “La condition urbaine, la ville à l’heure de la mondialisation”, Olivier Mongin définit de façon tout à fait intéressante les caractéristiques de l’habitat urbain dans une société qui se mondialise.

Dans un premier temps, nous reprendons ce qu’il entend par ville globale, dans un second, les spécificités de l’habitat urbain dans une ville globale.

La ville globale

La ville dite globale est un concept nouveau, forgé par Madame Saskia Sassen, géographe, dans son ouvrage “The global city : New York, London, Tokyo”, publié en 1991 et régulièrement remis à jour par elle-même. L’auteure aborde l’évolution des villes durant la décennie 1980-1990, notamment suite à la dérégulation et la libéralisation des marché financiers au niveau mondial.

Un double phénomène est depuis cette période observé : primo, celui de la délocalisation des activités historiquement dans les pays dits développés vers les pays à bas salaires, créant des crises répétées dans les vieux centres industriels européens et américains. Secundo, une forte concentration des fonctions de direction et de commandement de ces marchés mondiaux dans un nombre restreint de villes appelées ‘villes globales’. Au contraire de termes comme ‘mégapole’ ou ‘métropole’ qui renvoient à des aspects quantitatifs de nombre d’habitants, niveau de richesses, dimensions de l’habitat (étalé), la ‘ville globale’ indique qu’elle possède un haut niveau de ‘commandement’ dans cette société financière et commerciale mondialisée.

Concrètement, ces villes globales possèdent des caractéristiques permettant de les identifier :

  • la concentration forte de services
  • la formation des élites de demain (campus universitaires et centres de recherche)
  • la présence de structures boursières et bancaires.

Bref, on y retrouve les sièges des multinationales dont les activités se répandent partout sur notre planète.

Pour en savoir plus sur le concept de ville globale : Doc de Saskia Sassen à télécharger : http://globalcities.free.fr/mesure.htm http://www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2004-3-page-9.htm

L’habitat urbain dans une ville globale face aux mégapoles

Olivier Mongin, dans son ouvrage “La condition urbaine” définit un type d’habitat urbain propre à ce type de ville dite globale. Il existe selon lui une différence radicale en termes d’habitat urbain entre les mégapoles et les villes globales. Les mégapoles sont des villes-monde, des villes sans limites qui s’étendent à l’infini, accueillant dans des habitants souvent précaires (bidonvilles) les personnes venues des zones rurales, voire des réfugiés ou migrants. Par contre la ville globale est une ville qui continue à définir ses limites, voire a tendance à se contracter sur elle-même au niveau de son habitat.

Ces mégapoles se retrouvent partout dans le monde, même si elles prennent des formes différentes : il peut s’agir du phénomène de l’urban sprawl aux Etats Unis (étalement urbain de l’habitat qui accompagne le démantèlement de la société industrielle) comme il peut renvoyer aux bidonvilles de Calcutta. Enfin, il estime qu’il existe d’autres cas de figure que ces deux ‘extrêmes’. Les villes globales n’ont plus pour objectifs – comme autrefois – de fixer des limites urbaines ni de favoriser l’intégration des populations et des fonctions (bureaux – habitat – commerces – …). Un exemple ? Il n’y a aucune volonté de rapprocher l’habitat des lieux de travail et la mobilité mise à disposition des moins nantis dans les périphéries est déficiente (volontairement ?)

Quel modèle d’habitat urbain dans ces villes globales ?

  • Au centre ville, il y a cohabitation entre deux types de population et donc deux types d’habitat urbain : des espaces où se regroupent les personnes en précarité attirées par les lieux de connection et de services (gares – métro – grands magasins – …) et des habitants des classes très nanties qui se regroupent souvent dans des zones sécurisées (cfr gated communities qui représentent 8% de l’habitat urbain aux Etats Unis). Ces populations aisées, résidant dans des centres ‘gentrifiés’ habitent le monde entier bien plus que leur ville. Les habitants sont des cadres supérieurs et des intellectuels qui vivent à l’heure de la mondialisation. Leur habitat urbain est ‘branché’ et ‘rénové’.
  • Les population de classe moyenne sont ainsi reléguées dans les espaces péri-ubain. Leur habitat est souvent pavillonnaire. Ces habitants, solutions des villes industrielles, sont le problème de la ville mondialisée. Ils doivent résider dans les périphéries, seules abordables financièrement et passent leur temps en navettes pour rejoindre le centre urbain. Ils se battent pour rester dans les zones résidentielles qui peuvent être différenciés en divers ilôts non connectés entre eux, les seules connections de ces habitats urbains se faisant avec le centre urbain.
  • Enfin, les populations les plus pauvres se retrouvent dans des logements sociaux, des quartiers plus pauvres, des bidonvilles. Le plus souvent sans emploi, ces habitants sont totalement immobiles et n’ont aucun lien avec le centre urbain. Leur habitat ne bénéficie que de peu des services de proximité en termes de mobilité. L’auteur les appelle les ‘relégués’.

COMMENTAIRES

Cette réflexion permet tout à la fois de comprendre ce que la mondialisation avec la perte des villes industrielles et intégratrices crée en termes d’habitat urbain, mais aussi de réaliser le lien incontournable entre habitat urbain et mobilité. Il existe en effet une déclinaison claire entre habitat urbain et accès à la mobilité, voire entre habitat urbain et temps de mobilité nécessaire pour accéder aux emplois et aux services urbains. L’habitat urbain doit donc se travailler en interconnection avec les autres caractéristiques de l’urbain pour une meilleure compréhension des phénomènes de mondialisation actuelle.

En guise de conclusion, nous reprendrons l’idée de l’auteur qui milite pour une politique qui ne se fonderait plus sur la notion de gestion des territoires, mais sur la recréation de lieux, lieux de vie, lieux d’existence permettant tout à la fois de (re)définir la limite de ces espaces urbains et de l’habitat urbain et de permettre aux habitants de (re)trouver un rapport au monde ‘local’ qui les entoure.